Le Cycle d’Antalia - Trois Saisons - L’Arnaqueur
Dans un avenir sans doute très lointain (ou très reculé, sait-on jamais...), la Terre fait partie d’une alliance galactique en lutte avec les redoutables Destructeurs. Au sein de cette alliance, elle constitue un élément clé car il y a sur terre des "doués", des humains dotés de pouvoirs particuliers. Et parmi eux, il y a ceux qu’on appelle les Etoiles. Particulièrement puissants, leurs dons parviennent à mettre en échec les tentatives d’invasion des Destructeurs. Mais la tâche du Chef Des Etoiles n’est pas facile... Car sur Terre, dans certains territoires, on considère les doués comme des pestiférés. Et ceux qui pourraient devenir des Etoiles n’en ont pas toujours envie ...
Brillant : c’est le mot qui vient spontanément à l’esprit à la lecture de Trois Saisons, un court roman d’environ 150 pages au format poche, qui parvient pourtant à nous emmener loin, très loin...
En nous proposant de suivre les destinées de trois femmes (Mélanie, Sonia, Automne), l’auteur nous fait découvrir les différentes facettes de la société - ou plutôt des sociétés - qu’il a imaginées, Pays Libres ou Villes Protégées, ainsi que les relations parfois assez subtiles qui unissent ou séparent différents personnages tels que Gardiens, Cardinal ou Chef Des Etoiles.
Ce que J.N. David réussit très bien dans ce roman, c’est à distiller peu à peu, par petites touchez, différentes informations qui sont autant de pièces de ce puzzle assez complexe... et qu’on sera loin de re constituer, même à l’issue du roman ! On ne saura pas dans Trois Saisons (ni dans L’Arnaqueur d’ailleurs), qui sont ces Destructeurs, d’où ils viennent et ce qu’ils veulent... pas plus qu’on ne saura précisément ce que sont les "yeux", ces dispositifs de surveillance qui semblent scruter les habitants de certaines zones, mais dont le rôle reste assez flou.
Pour autant, on ne ressort pas de la lecture de ce roman avec un sentiment de frustration, mais plutôt avec l’impression assez étonnante que pas un mot ne manque et que pas un mot n’est de trop. Allier une telle concision à une telle richesse d’idées est assez rare, il faut l’avouer. On peut se souvenir, en lisant Trois Saisons, du Chateau de Lord Valentin, de Robert Silverberg...peut être à cause des saltimbanques, mais aussi du fait de ce mélange assez étrange de technologie, de magie et de pouvoirs. Mais le roman de Silverberg faisait 500 ou 600 pages, en grand format !
Evidemment, on a envie d’en savoir plus sur ce mystérieux cycle d’Antalia (qu’est-ce qu’Antalia, d’ailleurs ?)... et on se plonge alors avec envie dans L’Arnaqueur, nouvelle d’une soixantaine de pages qui se situe dans le même "univers" que Trois Saisons.
Et là... déception et frustration. Non pas que l’Arnaqueur soit mauvais. Sur le fond, le texte reste intéressant et nous permet d’appréhender une autre facette de l’univers d’Antalia (et peut être aussi de découvrir une certaine fascination de l’auteur pour les danseuses ?). Mais la forme est hélas maladroite. Ecrire une nouvelle en se livrant à un exercice de style peut être une bonne idée, lorsque l’exercice est réussi... ce qui n’est hélas pas le cas ici.
Ecrit à la première personne et conçu comme une sorte de monologue en voix off de film noir, on imagine très bien, en lisant le texte, le héros à la fois solitaire, désabusé mais en même temps prêt à fondre à la première occasion devant la première jolie fille venue qui saura le prendre dans le bon sens du poil... malheureusement, cette ambiance est gâchée par une ficelle trop grosse pour passer inaperçue et indigne du talent que J.N. David a pourtant démontré dans Trois Saisons. En oubliant volontairement les négations, il commet deux erreurs. Il confond dialogues de romans et dialogues de cinéma, car ce qui passe bien dans le langage parlé ne passe pas nécessairement aussi bien à la lecture*. Et il fait ainsi "sortir" le lecteur de son roman : choqué (le mot est peut être un peu fort, mais bon...) par cette syntaxe approximative, il peut pas rester immergé dans le récit. Oui, vous avez bien lu, j’ai oublié le "ne" dans la phrase précédente... c’est dérangeant, n’est-ce pas ?
C’est d’autant plus dommage que c’est le seul défaut de ce texte... Mais on ne lui en voudra pas ! Bien au contraire, on ne peut que l’encourager à continuer d’enrichir cet univers fascinant d’Antalia... et encourager les amateurs de bonne SF à découvrir Trois Saisons.
*Ou alors il faut s’appeler Frédéric Dard pour faire du Michel Audiard en version littéraire...
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