Le Royaume De Tobin 1 - Les Jumeaux (The Bone Doll’s Twin)
"Tant qu’une fille issue de la lignée de Thélatimos la gouverne et défend, Skala ne court aucun risque de jamais se voir asservir". Du fait de cette prophétie, Skala a longtemps été régie par des reines guerrières, jusqu’au jour où le prince Erius s’empare du pouvoir et élimine toutes les prétendantes au trône. Toutes sauf sa demi-soeur Ariani, enceinte de jumeaux, une fille et un garçon. Accompagnée de son apprenti Arkoniel, Iya la magicienne âgée de plus de deux siècles est bien décidée à éviter la catastrophe que l’Oracle lui a révélée. Elle rejoint Ariani lors de son accouchement et, persuadée qu’Erius éliminera la fille, décide de sacrifier le garçon pour la sauver. Grâce à ce sacrifice, avec l’aide de la sorcière Lhel, un sort très puissant donne à la petite fille, aux yeux de tous, l’apparence du petit garçon que son frère aurait été. Mais l’esprit de ce dernier refuse de disparaître et revient hanter celle qui a pris sa place...
Celles et ceux qui aiment la fantasy et ses sagas souvent à rallonge le savent : il faut parfois attendre jusqu’à une bonne centaine de pages avant que l’action démarre. C’est un défaut quasiment inhérent au genre, qui nous raconte le plus souvent le destin extraordinaire d’un personnage, généralement jeune, qui va finalement devenir un héros et sauver son monde, après avoir réuni autour de lui un certain nombre de compagnons qui vont l’aider dans sa quête...
Lynn Flewelling a poussé la logique de cette démarche à l’extrême, en choisissant de débuter sa saga avec la naissance de son héroïne...que tout le monde, dans ce premier tome, prend pour un garçon !
De ce point de vue, l’auteur innove avec cette intrigue originale, qui amène nécessairement son roman vers des territoires jusqu’à présent inexplorés par la fantasy classique. Le problème, c’est que les premières années de la vie de Tobin n’ont rien de bien passionnant, si bien qu’il faut attendre d’avoir passé les 200 premières pages pour trouver de quoi se mettre sous la dent... c’est donc long, très long avant de pouvoir réellement s’immerger dans ce roman qui pose les bases de ce qui va suivre et qu’on peut déjà imaginer.
Car on le voit bien au travers de son attachement pour une poupée, Tobin ne pourra pas éternellement tromper son entourage et il/elle sera inévitablement rattrappée(e) par la nature... et on imagine déjà, dans le volume suivant, l’arrivée de ses premières règles et, peut-être, une première histoire d’amour avec Ki, le seul ami de son âge, choisi par Iya pour le sortir de sa solitude.
Quant aux enjeux, au delà de l’enfance de Tobin, il faut attendre les 100 dernières pages avant d’être confronté avec les mesures prises par Erius à l’encontre des magiciens, mesure qui ne sont pas sans rappeler celles prises par les nazis à l’encontre des juifs à la fin des années 30 (mais après tout pourquoi pas, l’histoire ayant hélas tendance à se répéter)... On peut donc se dire, là aussi, que la seconde partie devrait s’avérer plus riche en rebondissements et en action, mais en attendant, on reste un peu sur sa faim.
Heureusement, il y a le frère de Tobin ! Présence généralement malveillante, l’esprit de celui qui a été sacrifié pour que Tobin vive à sa place semble rêver de vengeance et ses pouvoirs s’avèrent bien plus puissants que ce que les magiciens auraient pu imaginer. C’est grâce à lui, finalement, qu’on ne s’ennuie pas trop à lecture de ce roman qui accorde un peu trop de place aux états d’âme du jeune Tobin, à sa passion pour la sculpture de figurines, à son attachement pour sa poupée, à ses jeux avec la ville en modèle réduit que lui a offerte son père, à ses débuts avec une épée. Il faut s’appeler Robin Hobb pour passionner les lecteurs avec ce genre de détails insignifiants et malheureusement, du moins sur ce premier volume, Lynn Flewelling n’a pas tout à fait son talent...
Espérons donc que la suite justifiera cette longue mise en place et que l’action décollera enfin !