Les Oiseaux (The Birds )
Mélanie Daniels est une sorte de petite Paris Hilton. Fille gâtée du propriétaire d’un grand quotidien, elle semble se contenter d’une vie superficielle, de farces et de provocations qui lui valent parfois de faire la "une" du journal de son père... jusqu’au jour où elle rencontre dans une oisellerie Mitch Brenner, venu acheter un couple d’inséparables pour sa jeune soeur. Alors qu’elle tente de se faire passer pour une employée du magasin, Mitch (qui l’a reconnue) entre dans son jeu et lui tient tête. Séduite et bien décidée à le revoir, elle retrouve sa trace et décide d’aller lui rendre une visite surprise à Bodega Bay, un petit port de pêche un peu paumé où il passe ses week ends. Mais en chemin, elle est attaquée par une mouette...
On se demandait à l’époque ce que Hitchcock pourrait bien trouver avec son fameux Psychose et son inoubliable scène de la douche... et il y a eu, 3 ans plus tard, Les Oiseaux.
S’il n’avait pas choisi un titre aussi explicite, le réalisateur aurait sans doute pu créér un bel effet de surprise ! Car la première moitié du film est consacrée presque exclusivement à la "love story" entre Mélanie et Mitch et on aurait même pu croire à une simple intrigue policière compte tenu des éléments mis en place par le scénario, tels qu’une mère possessive et une ex encore très amoureuse qui auraient été deux parfaites suspectes en cas de meurtre...
Mais c’est bien de fantastique et d’horreur qu’il s’agit, dans cette histoire librement inspirée d’une nouvelle de Daphné du Maurier. Et c’est lors d’une fête organisée pour l’anniversaire de la jeune soeur de Mitch que la première véritable attaque se produit. D’abord des mouettes, puis un peu plus tard des moineaux, puis des corbeaux... Tous les oiseaux semblent pris d’accès de rage momentanés et s’en prennent de concert aux humains, cherchant délibérement à les tuer.
Cela donne quelques scènes particulièrement impressionnantes pour l’époque (et encore aujourd’hui, même si on "voit" certains trucages), comme celle de l’attaque des élèves de l’école ou encore celle où Mélanie se retrouve isolée dans le grenier rempli d’oiseaux... Mais d’autres, moins spectaculaires, sont tout aussi réussies. Si la scène de la douche dans Psychose est devenue culte à titre de modèle de réalisation, celle où on voit Mélanie fumant une cigarette sur un banc en plan serré pendant que les oiseaux s’accumulent peu à peu sur une structure métallique derrière elle, n’est pas mal non plus...
Et outre son sens unique de la réalisation, Hitchcock a fait preuve d’une belle maîtrise des effets spéciaux, utilisant pour son film différentes techniques, avec quelques milliers d’oiseaux dressés mais aussi des oiseaux mécaniques, des surimpressions d’images (c’est la raison pour laquelle on voit parfois des nuées d’oiseaux passant devant les acteurs, mais jamais derrière...), l’utilisation de fonds peints...
Le résultat s’avère remarquablement efficace et même si certains trucages font aujourdh’ui sourire, on reste toujours aussi pris par l’histoire et le suspense qu’à l’époque de sa sortie. La bande son, exclusivement constituée de sons d’oiseaux (c’est d’ailleurs parfois assez pénible), sans aucune musique, y est aussi pour beaucoup, de même que les acteurs, très convaincants. Tippi Hedren, typique blonde hitchcokienne, s’avère une comédienne remarquable, surtout pour un premier film et pas uniquement pour son charme et sa plastique d’ex-mannequin ! Et on retrouve avec plaisir Rod Taylor, alias H.G. Wells dans l’inoubliable Machine A Explorer Le Temps sorti trois ans avant, mais aussi Suzanne Pleshette (vue dans La Guerre Des Cerveaux), Jessica Tandy (Cocoon 1 et 2, Miracle Sur La 8ème Rue) ainsi que Veronica Cartwright, qui quelques années après ce rôle de jeune soeur du héros est devenue la Lambert de Alien !
Et cerise sur la gâteau, il y a quelque chose d’indéfinissable mais de vraiment fantastique dans les dernières images du film, alors qu’on voit les survivants se glisser dans leur voiture en passant au milieu des oiseaux en se faisant tout petits, ceux-ci semblant les laisser passer comme pour leur dire " partez d’ici, c’est chez nous maintenant", sans savoir si cela ne va pas s’étendre au reste du monde... Du grand art, vraiment. Et de quoi regretter qu’Hitchcock ne nous ait pas donné d’autres films de ce genre...