10, Cloverfield Lane

En pleine rupture avec son fiancé, Michelle est victime d’un accident de la route, après que sa voiture ait été percutée par un camion. Lorsqu’elle se réveille, elle découvre qu’elle est sous perfusion et attachée. Celui qui l’a soignée, un certain Howard, lui explique qu’ils trouvent dans un abri souterrain, qu’il y a eu une attaque et que l’air à l’extérieur est devenu irrespirable. Michelle fait ensuite la connaissance du troisième occupant de l’abri, Emmett, qui lui confirme les faits relatés par Howard. Mais lorsque le système de filtration de l’air tombe en panne, Michelle découvre un passage vers la surface et fait une découverte très inquiétante concernant Howard...
Au vu de la bande annonce comme à la lecture du "pitch", on pouvait s’attendre à un thriller psychologique intense et stressant, qui pouvait basculer dans la SF... ou pas, si l’histoire racontée par Howard s’était avérée être le fruit de son imagination, voire d’un esprit malade. Et cela démarrait plutôt bien, avec un John Goodman inquiétant au possible, parfait pour ce rôle avec sa carrure imposante face à la frêle (et séduisante) Mary Elizabeth Winstead (Abraham Lincoln Chasseur de Vampires, The Thing, Scott Pilgrim...).
Malheureusement, l’introduction d’un troisième personnage vient interrompre bien trop tôt un tête qui tête qui s’annonçait prometteur et particulièrement tendu. Et c’est d’autant plus regrettable que le personnage d’Emmett ne s’avère pas indispensable à l’intrigue, qu’il affaiblit au contraire. Et lorsqu’il disparaît, c’est juste avant que Michelle parvienne à s’enfuir de l’abri, ce qui fait passer le film dans une autre dimension. Car à partir de là, il devient clair qu’Howard a dit la vérité, ce qui tue définitivement tout suspense, l’enjeu se réduisant ensuite à la survie de l’héroïne face à des créatures extra-terrestres, ce qui n’a rien de bien original. Et cette dernière partie n’est pas juste un twist final, elle occupe quasiment un quart de la durée du film...
En fait, tout se passe comme si Dan Trachtenberg, réalisateur relativement débutant, n’avait pas eu le courage d’aller jusqu’au bout de l’idée fascinante du scénario. Pourtant, avec un minimum de talent (que Trachtenberg possède sans doute), il aurait possible de pousser beaucoup plus loin l’ambiguité de la situation (et avec elle la tension psychologique) pour tenir le spectateur en haleine, ne sachant pas jusqu’à la dernière minute ce qui peut bien se trouver à l’extérieur de l’abri. Mais il était sans doute plus simple et plus rassurant d’introduire un troisième personnage pour faire un peu de remplissage, puis de sortir du huis clos pour introduire de l’action, des aliens et des effets spéciaux...
Et quel rapport avec le Cloverfield de 2008, me direz-vous ? Eh bien, il semblerait qu’il n’y en ait aucun. On se souvient en effet du monstre gigantesque, sorte de Godzilla survitaminé détruisant New York, dont rien ne laissait à penser qu’il pouvait s’agir d’une créature extra-terrestre. D’ailleurs, dans 10 Cloverfield Lane, on ne retrouve pas de créature équivalente. En fait, le seul point commun entre les deux films est leur producteur J.J. Abrams et, peut-être, l’esprit dans lequel ils sont réalisés (des événements tragiques et extraordinaires, vus de loin et de manière très partielle par des personnages occupés par leurs propres problèmes).
Mais en bon producteur, Abrams ne manquera sans doute pas de nous proposer un troisième film pour exploiter le filon Cloverfield, qui nous permetttra de faire le lien entre les différents événements... ou pas !