Fido
Dans les années 50, des particules venues de l’espace ont provoqué le réveil des cadavres, et ce fut le début de la guerre des zombies. Heureusement pour l’humanité, un scientifique a découvert le moyen, dans un premier temps de les trucider définitivement, et dans un deuxième temps de les contrôler. C’est ainsi que fut fondée Zomcon, une entreprise qui semble désormais diriger ce qui reste de la civilisation... c’est à dire des villes isolées les unes des autres, entourées de clôtures qui les protègent des zombies qui rôdent dans la "zone sauvage".
Dans ces drôles d’années 50, il est de coutume d’avoir un zombie à son service (voire plusieurs). Grâce à leur collier de contrôle, pas de danger. Mais même avec un collier, Monsieur Robinson ne veut pas de zombie chez lui... jusqu’au jour où sa femme craque et en ramène un à la maison. Il va peu à peu devenir le meilleur ami de Timmy, le petit garçon de la famille, et ... de Madame Robinson, qui va développer un étrange attirance pour celui que son fils a baptisé Fido !
Il y a dans ce film deux ou trois traits de génie ... et un ou deux points faibles. On voit tout de suite dans quel sens penche la balance !
Techniquement, le récit est une uchronie, ce qui est déjà rare en littérature, et rarissime au cinéma. Que signifie ce terme barbare ? Tout simplement qu’au lieu de se situer dans un avenir hypothétique, le récit se déroule dans un passé hypothétique. Pour résumer, disons que le scénariste s’est posé la question : que se serait-il passé si ... (si des particules venues de l’espace faisaient revivre les morts , etc) ?
Et cette uchronie permet de donner au film un cachet particulier, avec un parti pris esthétique très particulier : celui du quartier résidentiel idéal, tel que Tim Burton l’a montré dans Edward Aux Mains d’Argent (on pourrait également citer Pleasantville, The Truman Show ou dans un autre genre le fameux quartier de Wisteria Lane de la série Desperate Housewives). Certes, le réalisateur n’a rien inventé, mais il a le mérite d’utiliser ce style à très bon escient, en créant de nombreux décalages :
entre la vie idyllique dans cette petite ville qui est, rappelons le, isolée et cernée par des zombies "sauvages" mangeurs de chair humaine et la cruelle réalité (entraînement des enfants au maniement des armes, etc)
entre l’apparence d’un amérique toujours aussi démocratique et la dérive totalitaire qui est suggérée, avec en filigrane la toute puissance de Zomcon, qui endoctrine les enfants dès leur plus jeune âge
entre les schémas classique de la vie de famille façon "petite maison dans la prairie" et celle qui est décrite dans le film, avec un enfant et sa mère qui finalement s’attachent davantage à leur zombie qu’au père de famille !
Bref, au delà de la comédie, la satire sociale et politique n’est pas loin. Et si on ne rit pas aux éclats, c’est précisément parce que le film nous met, par moments, plutôt mal à l’aise. On pourrait disserter longuement sur ce que ces zombies symbolisent (esclaves noirs du 19ème siècle, prolétariat du 20ème, certaines catégories de population du 21ème) ... le fait est qu’on est mal à l’aise. On n’ose pas non plus imaginer ce qui se passe chez Monsieur Theopolis, avec sa Zombie surnommée "Tammy" ... Car on se rend bien compte que Fido conserve une part de libre arbitre et de conscience. Et si c’est vrai pour lui, c’est que ça l’est pour les autres zombies...
Malheureusement, après un début de virtuose, Andrew Currie se laisse (un peu) aller à la facilité. Le film perd un peu de son rythme et de sa force. Car le second degré étant omniprésent, on a tendance à garder du recul et du coup on ne peut véritablement s’immerger dans le film et s’attacher aux personnages.
En dépit de ce petit défaut, ce Fido reste un formidable spectacle, original, caustique et intelligent. Ceux qui pensaient qu’on avait fait le tour de la question du film de zombies comique avec Shaun of the Dead se trompaient lourdement. Et quelle surprise de découvrir Carrie-Ann Moss ( ex Trinity de la trilogie Matrix) en mère de famille au regard parfois lubrique à l’égard de son zombie !
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