Alice au Pays des Merveilles (Alice In Wonderland)
Alice a 20 ans et elle est sur le point de dire "oui" à un mariage arrangé avec un "Lord" qui n’a rien d’un prince charmant. Elle a complètement oublié son premier passage au pays des merveilles... jusqu’au moment où un certain lapin fait son apparition. Partant à sa recherche, elle va à nouveau tomber dans le terrier qui va la ramener de l’autre côté, pour découvrir que la Reine Rouge a pris le pouvoir, terrorise la population et que d’après la prophétie, elle doit retrouver une épée et le ramener à la Reine Blanche pour que celle-ci reprenne sa couronne ...
Les puristes et admirateurs de Lewis Carroll ne vont sans doute pas aimer du tout... Transformer Alice en une guerrière affrontant un dragon l’épée à la main, il fallait quand même oser !
A sa décharge, il faut dire que reproduire dans leur intégralité les péripéties d’Alice au pays de l’absurde (le roman est un chef d’oeuvre de ce que les anglais appellent le "non-sense") aurait sans doute largué plus d’un spectateur en route... De plus, il faut bien avouer que la critique à peine voilée de la société victorienne de l’époque de Carroll (avec la Reine Rouge dans le rôle de la reine d’Angleterre) et d’une certaine façon d’éduquer les enfants, n’a plus guère de signification à une époque où les gamins de 10 ans commencent à utiliser un portable, surfent sur le net et rêvent de se faire faire leur premier piercing ...
Le plus simple était donc sans doute de recourir à un scénario original, empruntant aux deux romans de Lewis Carroll (Alice au Pays des Merveilles et De L’Autre Côté du Miroir), en gardant uniquement les principaux personnages (il faut faire simple, de nos jours), en particulier ceux susceptibles de plaire aux enfants tels que les animaux parlants, en y ajoutant une intrigue "classique" destinée à injecter un peu d’incertitude et de suspense (j’ai bien dit "un peu"...).
Le résultat est évidemment assez proche d’un dessin animé ... de Disney ( le chat du Cheshire du film ressemble d’ailleurs beaucoup à celui du dessin animé de 1951), ce qui n’est pas un hasard si on considère que la scénariste Linda Woolverton avait auparavant travaillé sur La Belle et la Bête, l’Incroyable Voyage, Le Roi Lion et Mulan !
Reste le talent de Tim Burton et sa capacité à créer des univers aussi différents et magiques que ceux de Beetlejuice, Charlie et la Chocolaterie, Edward Aux Mains d’Argent... De ce point de vue là, cette adaptation d’Alice est évidemment, et de loin, la plus séduisante jamais produite. Qu’il s’agisse des personnages, réels ou de synthèse, des paysages et des décors (notamment le formidable palais de la Reine Rouge), le film est bluffant, au même titre (dans un genre différent) qu’un Avatar. Il faudrait sans doute visionner le film à plusieurs reprises pour profiter pleinement des détails des décors et lister les références aux deux romans de Caroll (comme par exemple les soldats de la Reine Blanche évoquant les pièces de jeu d’échecs de De L’Autre Côté du Miroir).
Les acteurs, évidemment, se sont régalés ! Helena Bonham Carter fait une nouvelle la preuve, après La Planète des Singes (de Tim Burton également), de sa capacité à jouer avec des maquillages invraisemblables et campe une formidable Reine Rouge obsédée par l’idée de faire couper la tête à quiconque la contrarie (et ils sont nombreux)... Quant à Johnny Depp, l’acteur fétiche du réalisateur, on sait depuis Pirate des Caraïbes qu’il n’a nul besoin de Tim Burton pour cabotiner ! Avec modération, heureusement...
Mais il faut bien avouer que l’intérêt du film est avant tout dans ses images. Alice au Pays des Merveilles a ceci de commun avec Avatar que la prouesse visuelle passe au premier plan, reléguant loin derrière les considérations moins flatteuses que l’on pourrait pointer concernant son scénario. Au niveau de la 3D, en revanche, Disney a encore des progrès à faire, ses caméras étant nettement moins performantes que celles de Cameron (les personnages et objets en mouvements rapides sont complètement flous). Tim Burton aussi, d’ailleurs, qui multiplie les effets faciles de projections au visage du spectateur, comme dans une vulgaire attraction du Futuroscope !
Les parents les plus responsables se satisferont probablement de la morale du film : le message distillé aux enfants par Lewis Carroll n’a rien perdu de sa pertinence : il faut savoir rester soi-même et décider par soi-même de sa vie... même si la fin est finalement un peu curieuse, avec une Alice qui semble se lancer dans les affaires en conseillant au père de son fiancé éconduit de s’implanter en Chine ! C’est bien américain, ça... business is business !
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