Avatar
Si Pandora, la planète imaginée par James Cameron, existait réellement, nous serions sans doute nombreux à nous ruer dans les agences de voyage spatial pour réserver un billet pour nos prochaines vacances ! Magnifiés par la 3D (qui pouvait difficilement trouver un meilleur vecteur de promotion qu’Avatar), les paysages de cette planète sont tout simplement hallucinants de beauté, mais aussi de réalisme. On s’y croirait. Certains trouveront ça banal... mais c’est bien au contraire essentiel ! Tout d’abord, c’est la première fois dans l’histoire du cinéma que l’on nous offre une vision aussi complète d’une autre planète : faune, flore, habitants, civilisation, culture... Ensuite, la véritable héros du film, ce n’est ni Jake Sully ni son avatar, c’est Pandora elle-même !
Pas de perte de temps (ce qui est remarquable pour un film de 2h40) : on entre dans le vif du sujet dès les premières minutes.
Jake Sully est un marine. Ayant perdu l’usage de ses jambes, il est appelé à remplacer, pour cause d’ADN quasi-identique, son frère jumeau qui travaillait sur le programme Avatar consistant à transférer l’esprit d’un homme dans le corps développé artificiellement d’un Na’vi, pour devenir un des habitants de la planète Pandora.
Il s’agit d’apprendre à mieux connaître ce peuple étrange et de négocier pacifiquement avec lui l’exploitation des réserves d’unobtainium, un minerai extrêmement rare et précieux (et bien connu des amateurs de SF ...), que recèle Pandora. Mais pour l’officier des marines en charge de la mission sur Pandora, il s’agit avant tout d’infiltrer l’ennemi, pour mieux identifier ses points faibles en vue d’un affrontement.
Jake joue le jeu... et le joue si bien qu’il réussit ce qu’aucun autre membre du projet Avatar n’avait réussi avant lui : se faire accepter par la population de Pandora, qui va lui enseigner comment devenir l’un d’entre eux. Jusqu’à quel point ? Jake le découvrira lorsque les marines, lourdement armés, attaqueront les Na’vi, dont le seul atout est leur corps de 3 mètres puissamment musclé et un lien particulièrement étroit avec la nature et leur planète...
La première chose qui saute aux yeux dans ce film (indépendamment des bestioles en 3D), c’est qu’il est profondément américain... mais au bon sens du terme. Le parallèle entre les évéments se déroulant sur Pandora et ceux s’étant déroulés lors de la conquête de l’ouest, au détriment des indiens d’amérique, est évident. Il est d’ailleurs difficile de ne pas faire le rapprochement entre Avatar et Danse Avec Les Loups, dont on retrouve de nombreux éléments : la tenue d’un journal, l’initiation à une autre culture avec ses rites de passage, l’histoire d’amour "mixte", l’origine militaire du personnage principal...
On retrouve également la trame de Dune, avec un héros qui se retrouve isolé parmi un peuple étranger et qui doit apprendre leurs coutumes et leur mode de vie avant, finalement, de prendre leur tête pour les mener à la bataille.
Le scénario est donc relativement classique et relativement prévisible. Même si on n’avait pas vu la bande annonce, on devine rapidement que le gentil marine (ça existe donc ...) finira par prendre le parti des indigènes, épousera la princesse et deviendra un Na’vi à plein temps !
Mais l’intérêt n’est pas là ... de même que l’intérêt du King Kong de Peter Jackson n’était pas de savoir comment le film allait se terminer. Certaines histoires, certains thèmes, sont universels et éternels. Au delà de l’histoire d’amour entre deux races que beaucoup de choses opposent (très rarement traité dans le cinéma de SF, beaucoup plus dans la littérature), Avatar reprend également un thème qu’on pourrait qualifier d’actuel, celui d’un rapport à la nature que nous avons depuis bien longtemps perdu, pour la plupart d’entre nous. Ecologisme ou philosophie new age ? Peut être, mais on pourrait aussi remonter à Jean-Jacques Rousseau et à son mythe du "bon sauvage" ou de "l’homme naturel"... Comme quoi le sujet n’est vraiment pas nouveau ! ce qui est bien normal car le progrès technique (avant de devenir technologique) a toujours existé ... de même que les nostalgiques du passé et autres adeptes du "c’était mieux avant".
Et il est traité très habilement par Cameron, qui fournit une explication relativement rationnelle aux liens qui unissent les Na’vis à leur environnement, qu’il s’agisse de la faune ou de la flore, tout en donnant une véritable existence à leur divinité. C’est plutôt bien vu, même si là encore , ce n’est pas tout à fait nouveau (on peut se souvenir des étonnants Pequeninos de la planète Lusitania et de leur étrange symbiose avec les arbres, dans La Voix des Morts d’Orson Scott Card).
Cerise sur le gâteau, comme on dit chez un certain assureur, le film est techniquement plus que parfait : la perfection telle qu’on l’imaginait avant Avatar est largement dépassée. La planète et ses paysages ont déjà été évoqués, mais que dire de ces extra-terrestres incroyablement réalistes, expressifs et ... séduisants ? Cameron laisse loin, très loin derrière, tout ce qui a déjà été fait dans le domaine du "motion capture" par Robert Zemeckis et d’autres.
Evidemment ... tout cela est presque trop beau pour être vrai. Et c’est le principal reproche que l’on puisse faire à ce film : il est trop consensuel, presque trop dans l’air du temps ! Il prêche la tolérance, le respect de la diversité, le développement durable et l’harmonie avec la nature. Qui pourrait trouver à redire à cela ? Personne ! Mais tous ces bons sentiments, ces messages positifs ne dénoncent rien, ni personne. Avec un peu de subversion, le message n’aurait-il pas eu plus de force ? Peut être. Cela dit, quand un des personnages dit (je cite de mémoire, vous me pardonnerez les inexactitudes) : "quand un peuple est assis sur une ressource qu’on convoite, le meilleur moyen de mettre la main sur ces ressources est de faire croire que ce peuple est une menace", ce n’est pas aux indiens d’Amérique qu’on pense en premier ...
Du côté des acteurs, rien à dire. Sam Worthington confirme après Terminator Renaissance qu’il est un futur grand d’Hollywood ; Sigourney Weaver est en train de devenir peu à peu une légende de la SF ; Michelle Rodriguez fait du Michelle Rodriguez, en treillis, grosses mitrailleuses au bout des mains ; Stephen Lang est aussi sympathique dans le rôle du colonel que dans la plupart de ses autres rôles ; et Zoe Saldana enchaîne un deuxième rôle culte après celui d’Uhura dans le Star Trek de J.J. Abrams.
Quant à Cameron lui-même ... on est heureux de le voir revenir à la SF après son blockbuster maritime. On peut d’ores et déjà parier qu’il y aura dans les 10 années à venir autant de dérivés d’Avatar qu’il y en a eu d’Alien dans les années 80 !
On ne m’elèvera pas de l’idée que Cameron a introduit dans ce film, volontairement, de nombreuses références à Aliens et même plus encore : une sorte de cohérence entre les deux films (censés se dérouler à environ 20 ans d’intervalle). Comme dans Alien (avec ou sans "s"), il s’agit ici d’exploiter un minerai ... et même si le rôle du civil en cheville avec le colonel n’est pas très clair, on le verrait bien appartenir à une certaine compagnie qui cherchait à tout prix à recueillir un spécimen de l’alien. Sans parler de l’affrontement final entre Jake et le colonel, quasiment indentique à celui entre Ripley et la créature dans Aliens, les rôles étant ici simplement inversés : le gentil est l’extra-terrestre, alors que l’humain dans l’exo-squelette est le méchant ...
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