La Route
On ne sait pas ce qui s’est passé... une catastrophe climatique à l’échelle planétaire, à moins qu’il s’agisse peut être d’un météore... mais la terre est désormais plongée dans une semi-obscurité, des nuages éternels ne permettant plus aux hommes de voir le soleil. Tous les animaux ont disparu et la végétation est morte. Parmi les quelques rares humains qui sont parvenus à survivre, une dizaine d’années d’après, certains ont fait le choix du cannibalisme... mais même pour eux, trouver à manger devient de plus en plus difficile. Dans ce monde impitoyable, un homme et son fils, né peu de temps après la catastrophe, font route vers le sud, vers la mer ...
Oubliez le cinéma en couleur, les effets spéciaux numériques, la 3D ... pendant près de deux heures, c’est du gris, du gris et encore du gris. Les quelques rares touches de couleur sont réservées aux flash-backs, un procédé que le réalisateur n’utilise qu’à petites doses, davantage pour suggérer que pour expliquer.
Mais un des premiers flash-backs plante le décor lorsque la mère, après avoir perdu les eaux, tente désespérément de ne pas accoucher et de se retenir de pousser ... Et pour ceux qui n’auraient pas encore compris que pour ce qui est de la franche rigolade, ils se sont trompés de salle (ou de DVD), on a ensuite droit à un cours de suicide donné par le père à son fils, quelques années plus tard. Il faut dire qu’il ne leur reste plus que deux balles dans le barillet de leur revolver et qu’il n’est pas question de tomber vivant aux mains des cannibales (ceux qui manquent un peu d’imagination comprendront mieux ensuite pourquoi)...
Oubliez aussi les scènes d’action et les actes héroiques. Ici, il est question de survie et pour cela, la meilleure solution est encore de ne surtout pas se mêler des problèmes des autres, de fuir ou de rester planqué et de ne surtout pas bouger, en attendant que ça passe. C’est ainsi que le père (on ne connaîtra jamais son nom) abandonne un vieil homme à son triste sort, applique la loi du talion à un autre vagabond qui a tenté de leur voler le peu qu’ils possédaient et laisse une femme et son fils à leur triste sort lorsqu’ils se font capturer par une bande dont on ne peut qu’imaginer les intentions...
Inspiré du célèbre roman La Route de Cormac McCarthy (Prix Pulitzer 2007, que je n’ai pas lu au moment où j’écris ces lignes, mais qui a été brillamment commenté sur ce site par Laurence Verdier), le film bénéficie d’une réalisation sans aucune concession et d’un casting brillant, avec Viggo Mortensen (Aragorn dans la saga du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson), mais aussi Robert Duvall méconnaissable en vieil homme et Charlize Theron pour quelques apparitions sous forme de flash-back, dans le rôle de la mère ayant finalement opté pour le suicide.
Tourné dans des décors naturels, notamment de Louisiane après le passage de l’ouragan Katrina (ça vous donne une idée de l’ambiance), La Route est indéniablement le film le plus déprimant réalisé depuis bien longtemps, à côté duquel Les Fils de l’Homme, par exemple, passerait presque pour une comédie légère... Il est aussi extrêmement émouvant - c’est ce qui fait sa force - et pourtant, John Hilcoat ne cède à aucun moment à la facilité, au mélo. Bien au contraire, il reste en permanence dans le registre de la pudeur, de la retenue, presque du non-dit.
Quant au contenu, le film pose simplement LA question, sans doute la plus fondamentale de toutes : qu’est ce qui fait que la vie mérite d’être vécue ? Peut-on (faut-il) continuer à vivre envers et contre tout, même dans les pires conditions ? On connaît bien entendu la réponse et il n’est nul besoin pour cela d’avoir recours à la SF. Il suffit, hélas, de regarder ce qui peut se passer à certains endroits de la planète, pas très loin de nous finalement. Mais il est toujours bon de se reposer ce genre de questions, de temps en temps ... Et de se rendre compte que les enfants constituent une des réponses, parce qu’ils sont porteurs d’espoir, d’innocence et d’une foi inébranlable en un avenir meilleur.
Et si après tout ça vous n’avez pas compris que La Route est un film à voir absolument, je n’ai plus qu’à manger mon clavier !
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