Class of 1984
Le cinéma nord-américain s’était emparé du problème de la violence scolaire de manière juste et engagée en 1955 dans "Graine de violence", mais quand l’ancien réalisateur de "Ça cogne et ça rigole chez les routiers" et futur cinéaste de "Commando" décide d’en faire de même sous couvert du thème anticipation, à quoi pouvait-on s’attendre ?
Le début des années 80 marque un tournant dans les thèmes abordés par le cinéma d’exploitation, en particulier depuis deux œuvres choc sorties au tournant de la nouvelle décennie : Mad Max de George Miller en 1979 et New-York 1997 de John Carpenter en 1981. Dès lors, le cinéma (ultra)bis va s’engouffrer dans la brèche du post-apocalyptique avec en point d’orgue 1982 qui verra la même année sur les grands écrans cohabiter le meilleur, Mad Max 2 ou le délicieusement nanar Les guerriers du Bronx . Le film canadien Class of 1984 surfe ainsi plus ou moins sur la même mouvance, un vigilante en milieu scolaire mais avec des jeunes "punks" tout droit sorti d’un post-apocalyptique transalpin avec cerise sur le gâteau, l’aspect anticipation puisque les faits se passe dans un futur proooooche...
1984, le fringuant professeur de musique Andrew Norris (Perry King alias Coddy Allen dans la série typiquement 80’s Riptide ) fraichement débarqué de sa campagne se retrouve muté au lycée Lincoln connu des environs pour sa faune rebelle et inhospitalière ( 1 ). Premier point, cette mutation ressemble étonnamment à une promotion vu l’enthousiasme et l’œil vif de notre professeur à la veste de velours, étrange... encore un idéaliste que la réalité du quotidien va briser. Tout en faisant connaissance avec son collègue professeur de biologie Terry Corrigan (Roddy McDowall) et avec les détecteurs de métaux situés à l’entrée, Norris découvre assez rapidement que son amour des gammes risque de n’être pas suffisant tant les esprits de mauvais volontés font corps à Lincoln... et en particulier un certain monsieur Peter Stegman, jeune punk (de bonne famille), qui fait rien qu’a faire exprès de saper l’autorité du gentil professeur Norris. Non comptant de refuser le fougueux et brillant Stegman dans l’orchestre du vill... du lycée, le cuistre Andrew Norris décide de remettre en cause les divers trafics de Stegman et sa bande. S’en suit une scène torride dans les toilettes du lycée, où Norris tente de subtiliser la drogue de Stegman, et le point de non retour est franchi lors de la mort accidentelle d’un élève sous l’emprise de la drogue : la tension monte, les menaces fusent, la taule des voitures se froisse, la police semble dépassée... la guerre entre les deux protagonistes est inévitable et qu’importe les dommages collatéraux tel ce massacre de lapins innocents sacrifiés sur l’autel de la vengeance juvénile.
En faisant abstraction du sujet polémico-réactionnaire de Class of 1984 , les esprits les plus impartiaux noteront tout de même que la pilule a du mal à passer. Le genre vigilante étant déjà en soi des plus rebutants, le fait de placer l’action dans un lycée a de quoi laisser dubitatif... d’autant plus que l’aspect anticipation est avant tout un prétexte. Certes, la fiction aura dépassé la réalité si on tient compte de l’exemple de la présence des détecteurs de métaux, mais c’est tout de même peu. Disons qu’il aurait été plus intéressant de s’intéresser aux désœuvrements d’une jeunesse en manque de repère, même de manière secondaire, thème qu’on retrouve dans le chef d’œuvre de Katsuhiro Ōtomo Akira par exemple. Mais alors, que reste-t-il ? Roh mais quelques détails qui pourront toujours ravir l’amateur déviant : des situations aussi grotesques que prévisibles, des personnages frisant plus d’une fois le ridicule : Tim Van Patten (2) jouant le jeune voyou Stegman étant aussi crédible que la femme de Norris est émancipée, et plus grave pour un film qui se veut avant tout un divertissement (réac) : une action molle et stéréotypée (de quoi ravir le nanarophile mais les autres...) mais qui fit illusion puisque la violence du film aura réussi en son temps à émouvoir certains (le film fut interdit aux mineurs de moins de 18 ans en France).
Pour finir, il convient de souligner, comme d’autres films par le passé, Class of 1984 eut droit à la mention "film culte" et comme souvent, contexte historique ou non, la dite mention a de quoi faire sourire un quart de siècle après. Certes, ce long-métrage en plus de ses deux autres séquelles moisies ouvrit la voie à d’autres navets du genre dont les fameux The Subsitute avec les deux ringards de service Tom Berenger et Treat Williams, ou le crédible Dangerous Minds (VF : Esprits rebelles ) avec Michelle Pfeiffer en ancienne militaire du corps des marines... toujours est-il que pour le côté générationnel, vous repasserez, quant au ridicule et à la morale nauséabonde, merci pour eux, ils se portent bien.
Class of 1984 , un triste nanar faussement culte qui a la primeur d’avoir en son casting l’un des premiers rôles de Michael J. Fox dans le rôle d’Arthur "je sais qui a vendu la drogue, je sais qui m’a poignardé mais je dirais rien !".
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(1) On peut supposer que l’action se passe dans un Los Angeles proche, mais Mark L. Lester a l’idée faussement judicieuse de ne pas être explicite à ce sujet, croyant bon d’ajouter en guise d’introduction à son film : Ce film est basé sur des faits réels, même si peu de lycées sont à l’image de celui-ci aux États-Unis. Ce qui va se passer devant vos mirettes ma bonne dame peut arriver n’importe où ! Enfin dans deux ans, il vous reste ce laps de temps pour déménager à la campagne.
(2) Van Patten étant plus (re)connu pour ses talents de réalisateur TV puisqu’on lui doit des épisodes de : The Sopranos, The Wire, Sex & the City, Rome ou Deadwood.
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