Gravity
Mission de routine pour la navette spatialr américaine Explorer : effectuer quelques réparations sur le téléscope Hubble. Mais l’explosion d’un satellite russe va provoquer une réaction en chaîne. Ses débris vont détruire à leur tour d’autres satellites, provoquant de nouveaux débris lancés à haute vitesse dans l’orbite terrestre, balayant tout sur leur passage. Les astronautes Ryan Stone, une jeune scientifique inexpérimentée et Matt Kowalski, un vétéran pour qui cette mission doit être la dernière, se retrouvent les seuls survivants, coincés à l’extérieur de la navette suite au passage de la pluie de débris. Une longue lutte pour la survie commence alors...
Lorsqu’un film débarque ainsi, présenté comme un succès monstrueux aux Etats Unis, avec une promo mettant en avant les propos dithyrambiques de divers critiques, on a toujours un peu peur de se faire avoir et d’être déçu, le film se révélant finalement inférieur à nos attentes... mais ce n’est pas le cas avec Gravity.
Ce n’était pourtant pas gagné d’avance, avec un scénario épais comme un papier à cigarette et deux personnages seulement, pour 90 minutes d’un film se déroulant intégralement dans l’espace ! Mais Alfonso Cuaron , réalisateur d’Harry Potter Et le Prisonnier d’Azkaban et surtout de l’excellent Les Fils De l’Homme, a fait avec ce film un certain nombre de paris, qui se sont avérés gagnants.
Le premier pari, c’est celui du réalisme. Info ou intox, tous les astronautes interrogés, français comme américains, ont vanté l’incroyable reproduction des conditions réelles de vie dans l’espace. Même eux s’y croyaient en voyant le film, nous disent-ils... et il n’y a pas de raison de ne pas les croire. Et quoi qu’il en soit, le spectateur qui, lui, n’ a jamais mis les pieds dans l’espace, en prend plein les yeux.
Le second pari, c’est celui de la 3D. Gadget marketing dans 80 ou 90 % des cas, la 3D prend ici une réelle signification, que ce soit du fait même du sujet du film que par la manière dont il est réalisé. Dans la plupart des films, en effet, les acteurs évoluent en 2D, qu’ils soient filmés en 3D ou pas ! Ils ont généralement les pieds au sol, se déplacent de gauche à droite ou d’avant en arrière, mais n’ont finalement que peu d’occasions de se déplacer dans la 3ème dimension (verticale). Dans l’espace en revanche, en l’absence de gravité, la notion de "sol" n’a plus de sens, il n’y a même plus de haut ou de bas, la liberté de mouvement est totale. Et tout cela est accentué dans le film par le fait que la plupart des objets, des plus petits aux plus grands, sont perpétuellement en mouvement, le plus souvent en rotation... comme semble l’être la caméra, qui prend un malin plaisir à tourner autour des acteurs pour les filmer sous les angles les plus invraisemblables. Dans ces conditions, la 3D s’avère redoutablement efficace et "immersive".
Mieux vaut ne pas être sujet au mal de mer ou au vertige pour voir Gravity dans les meilleures conditions... Mais mal de mer et vertige ou pas, on ne peut qu’être captivé, fasciné par la beauté des images. On fêtera bientôt les 50 ans du jour où l’homme a mis les pieds sur la lune, mais Gravity nous rappelle que l’espace exerce toujours la même fascination, la même attraction aujourd’hui qu’en 1969 ?
Du coup, on ne se pose même pas la question de la vraisemblance du scénario. L’explosion d’un satellite, provoquée ou accidentelle, pourrait-elle réellement déclencher une telle réaction en châine ? Et des astronautes en perdition pourraient-ils aussi facilement (tout est relatif...) passer de Hubble à l’ISS (la station spatiale internationale) puis à Tiangong, la station chinoise*, pour emprunter et piloter leurs capsules de survie ? Peut être pas, mais est-ce si important que ça ? Non, car le film d’Alfonso Cuaron n’a d’autre ambition que de nous plonger dans l’angoisse etr le suspense.
Et de ce point de vue là, le film est parfaitement réussi. L’espace est sans doute l’environnement le plus hostile et le plus anxiogène qui soient et les longs plans fixes sur le vide, de même que les longues plages de silence, sont là pour nous rappeler que les personnages n’ont aucun droit à l’erreur et qu’une mort horrible les attend ) plus ou moins brève échéance.
Il n’y a pas grand chose à dire sur les acteurs, qui passent finalement au second plan, que ce soit George "what else" Clooney (déjà vu en astronaute dans le Solaris de Soderbergh) ou Sandra Bullock (qu’on n’avait pas revue dans la SF depuis Demolition Man en 1993). Dissimulés derrière leur combinaison, on ne les voit que rarement et c’est d’ailleurs une autre originalité de Gravity : on se concentre sur les voix et sur les dialogues, qui prennent une importance rarement atteinte au cinéma auparavant.
Au final, les esprits chagrins ne manqueront pas de comparer Gravity à 2001 L’Odyssée De L’Espace ou à Solaris (celui de Tarkovski) pour mieux souligner que le film de Cuaron n’est pas à la hauteur de ces deux références de la SF et ils auront raison... sauf que Gravity n’est pas un film de SF et ne cherche pas à faire passer le moindre message, à la différence de ses deux prédecesseurs. Gravity est un thriller, rien de plus, mais c’est peut être le meilleur qu’on ait vu depuis bien longtemps. Et s’il fallait le comparer à un film de SF, ce serait plutôt à Abyss de James Cameron.
Attention : spoiler ! Gravity aurait pu être meilleur, plus fort encore. Il aurait fallu pour cela que le film se termine mal, que Ryan ne revienne jamais sur terre et meure dans l’espace. Alfonso Cuaron a préféré un fin plus optimiste et une morale plus hollywoodienne, avec une héröïne traumatisée par la mort accidentelle de sa fille qui reprend goût à la vie après avoir frôlé (de très près et plusieurs fois !) la mort. Cette fin n’est ni idiote ni ridicule. Mais le reste du film, proche de la perfection, aurait sans doute mérité mieux.
*Les plus observateurs auront remarqué que parmi les nombreux objets flottant dans la station chinoise se trouvait... une raquette de ping pong. Comme quoi, dans l’espace profond, vous n’échapperez pas aux clichés !
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