La Nuit Déchirée (Sleepwalkers)
Les félidés sont une race ancienne et en voie de disparition... dotés de puissants pouvoirs - dont celui de prendre l’apparence humaine - ils se nourrissent de la force vitale de jeunes vierges (les vieilles vierges étant sans doute moins nourrissantes ...) et ne peuvent être tués par les moyens habituels. Le seul véritable danger qui les menace, le seul capable de les tuer est leur ennemi ancestral : le chat... Le jeune Charles Brady et sa mère Mary sont peut être les derniers de leur race. A peine arrivés à Travis, Indiana, Charles se met à la recherche d’une proie et ne tarde pas à se lancer à la conquête de la jeune et charmante Tanya Robertson. Car sa mère a le ventre vide ...
Pas étonnant qu’une race condamnée à se nourrir de vierges soit en voie de disparition dans les Etats Unis des années 90 ! Mais plaisanterie mise à part, Stephen King ne fait ici que reprendre un vieux thème, déjà développé dans La Féline de Jacques Tourneur en 1942 puis dans le remake de1982 , de manière un peu différente (la virginité de celle-ci lui permettait d’éviter de se transformer en panthère).
Ce qui est beaucoup plus original en revanche, dans La Nuit Déchirée, ce sont les rapports entre Charles et sa mère, qui ne sont pas ambigüs du tout : c’est bien d’inceste qu’il s’agit ! Et un inceste explicite au lieu d’être suggéré, en plus ! Alors que la version de Paul Shrader, en 1982, se montrait beaucoup plus discrète et pudique sur l’inceste suggéré entre frère et soeur...
De ce point de vue là, Mick Garris a fait fort car il aurait sans doute pu se retrouver avec une ribambelle de procès intentés par des associations bien pensantes dénonçant une scène aussi politiquement incorrecte et si peu chrétienne ... Heureusement pour lui, il était clair dès le départ que les félidés n’ont que l’apparence des humains et qu’ils sont des créatures plus proche de l’animal que de l’homme. Ouf, on a eu peur, la morale est sauve !
Il faut d’ailleurs souligner le fait que le réalisateur, dans ce film, s’avère considérablement plus et mieux inspiré que dans ses autres adaptations d’oeuvres (mineures*, si on excepte Le Fléau) du King. Déjà, avec 1h30 de film, il se concentre sur l’essentiel et c’est vrai que le film ne compte aucun temps mort. Ensuite, il optimise le peu de moyens à sa disposition en distillant les effets spéciaux (pas toujours très sophistiqués et pas toujours très réussis d’ailleurs) au profit d’autres procédés... et ça fonctionne ! La première scène du film, par exemple, est un modèle du genre qui nous plonge immédiatement dans une ambiance glauque, renforcée quelques minutes plus tard par la scène de danse entre Charles et sa mère, parfaite pour mettre le specateur mal à l’aise (ou pour exciter les plus pervers, mais c’est une autre histoire). Quand à la bande son, elle est assez remarquable, avec quelques bons morceaux (bien) choisis et surtout, surtout, la présence de l’extraordinairement envoûtant Boadicea d’Enya, peut être le seul titre capable de rivaliser avec la fameuse musique composée par John Carpenter pour Halloween, La Nuit des Masques...
On notera les apparitions furtives (cameos) de Stephen King, Clive Barker, John Landis, Joe Dante, Tobe Hooper et même, dans un registre différent, de Mark Hamill ! Mais, en plus de la présence de l’impressionnant Ron Perlman, c’est surtout la présence d’Alice Krige qu’on retiendra, une vieille routarde du fantastique ici au top de sa forme et surtout de sa beauté assez troublante, il faut bien l’avouer, dans son rôle de mère incestueuse ... Un beau contraste avec Mädchen Amick, charmante ex-mannequin de l’agence Elite reconvertie avec un certain succès dans le cinéma, ici dans le rôle de la jeune vierge un peu nunuche, qui séduira sans doute surtout les adolescents prépubères. Mais il en faut pour tous les publics !
Au global, La Nuit Déchirée fait donc partie de ces bons petits fantastiques pas très connus qu’on a plaisir à découvrir qui nous font passer 90 minutes de manière plutôt agréable.
* Mick garris a réalisé une "télésuite" de Shining, ainsi que les adaptations cinématograhiques de la nouvelle Riding The Bullet et du roman Desolation.
Commentaires (fermé)